Pourquoi le SEO dure 3 mois ? Tout savoir sur le Transition Rank

Vous entendrez souvent un consultant ou un expert SEO vous dire que « le SEO prend 3 mois ». Mais si on se base sur la rapidité du crawler Babbar (3 à 6 milliards de pages par jour) et sa position dans l’index cloudflare des bots vérifiés (entre 18e et 26e selon la rapidité de crawl moyenne observée) un moteur de recherche comme Google ne pourrais mettre qu’une seconde pour crawler une fois la totalité des pages d’un site de 69 000 urls (s’il allait à la vitesse du 18e mondial, alors qu’il est premier). Ce n’est donc pas le temps de crawler les urls qui est un sujet, mais plutôt le traitement qui suit.

Qu’est-ce que c’est que le Transition Rank

Définition simplifiée :

C’est une arme sophistiquée de Google pour lutter contre les pratiques SEO que Google décrit comme « abusives », décrite dans le brevet US8924380B1 par Ross Koningstein, le Transition Rank vise à maintenir « l’intégrité » des résultats de recherche en contrôlant et limitant l’impact des actions artificielles visant à améliorer le classement d’une page.

Prenons le résumé du brevet :

Ce que ça signifie :

Au lieu de faire passer un document d’un classement initial vers un nouveau classement, le système applique une période de transition pendant laquelle un rang de transition est attribué au document, rang qui change progressivement en suivant une fonction de transition de rang au lieu d’utiliser les facteurs habituels impactant la position.

Objectif assumé

L’objectif assumé est de lutter contre les pratiques que Google va définir comme du spam, et qui sont fréquemment utilisées dans le cadre d’actions SEO pour modifier le rang des urls d’un site.

Ici, Ross Koningstein nous nomme spécifiquement des actions considérées comme du spam :

  • La sur optimisation des mots clés :
    • C’est un signe que la sémantique est essentielle pour le moteur. La sur optimisation est un terme assez large qui regroupe essentiellement le bourrage de mots clés (répéter plusieurs fois un terme dans l’espoir d’augmenter la pertinence du document sur ce terme ou un terme associé).
  • Le texte invisible & le texte minuscule :
    • Un texte est rendu invisible aux utilisateurs par sa taille ou sa couleur, le rendu ne permet pas à l’utilisateur de le lire. Intégrons également la pratique de mettre un élément blanc ou une photo par-dessus un texte pour qu’il n’apparaisse jamais au lecteur. L’idée est similaire au bourrage de mot clés car le rendu HTML affiche ce texte mais le rendu réel ne permet pas de l’afficher réellement aux utilisateurs. C’est un texte spécifiquement conçu pour tromper le moteur.
  • Les redirections de page :
    • Mr Koningstein mentionne sans doute une pratique de redirections de pages d’un site expiré (un site qui n’existe plus et dont le nom de domaine a été réservé par un tiers) vers d’autres pages d’un site qui doit ainsi bénéficier de la popularité des anciennes pages. Cette pratique mise à part, les redirections de pages servent généralement pour déplacer une page de son ancienne adresse canonique vers sa nouvelle version canonique. Ici il précise plus bas que l’abus concerne les redirections de pages qui n’ont rien à voir entre la source et la cible.
  • La sur optimisation des balises META :
    • Un petit abus de langage pour parler des attributs de la balise meta, et qui servent directement ou indirectement au référencement. Mentionnons spécifiquement ici la description, qui doit servir à la réassurance et au clic des utilisateurs, et qui ne sert pas directement, mais est fréquemment retravaillée. Ici, la précision est faite sur une technique de bourrage de mots clés qui ne sont pas pertinents pour le contenu réel de la page.
  • La manipulation basée sur les liens :
    • Là c’est assez clair, il s’agit des pratiques d’acquisitions de liens, soit par l’achat, soit l’échange de liens ou la participation au contenu d’un tiers avec un lien vers son contenu en retour. Il mentionne spécifiquement les fermes de liens, mais on peut étendre cette affirmation aux vendeurs de liens en général.

Toutes les pratiques SEO sont potentiellement concernées par ce que vise ce brevet. En effet, le SEO ayant pour objectif d’améliorer le positionnement d’une page selon une requête visée, la notion de pertinence de la page peut différer entre le point de vue du moteur et de ses administrateurs et du point de vue de l’éditeur du site.

Sujets concernés

Spécifiquement, on note lors de la présentation de ce brevet qu’il est question de « Transition » et de modification de rang.

De fait, les seules pages qui sont concernées sont celles qui sont modifiées dans le but de changer les positions qu’elles ont avant la mise à jour.

On pourrait argumenter qu’une page qui n’existe pas encore à un rang indéfini qui est modifié à la publication de la page, mais ça n’aurait pas vraiment de sens puisque la page étant inconnue de Google, ce dernier n’a pas d’historique de modification pour cette page. On sait que pour les pages qu’il connaît, cet historique remonte sur les 20 dernières modifications. 

Comment et pourquoi ça marche ?

Concrètement, cet algorithme repose sur deux piliers : la détection et la phase de transition.

La détection : identifier les modifications du document

Le brevet définit que le système détecte des modifications sur le document en comparant

(Attention, ici, les 10% sont un exemple).

Ici, le dépositaire du brevet explique que, de façon large, toute évolution de facteur de classement est une tentative de modifier le rang d’un document et rend donc une page candidate à la phase de transition, et c’est effectivement possible. Il explique spécifiquement que tout se base sur la comparaison entre l’ancien rang et le rang cible. 

La phase de transition pour identifier une réaction

Le process est le suivant :

  • Trouver l’ancien rang
  • Trouver le rang cible
  • Sélectionner la fonction de transition de rang (il y en a donc plusieurs)
  • Avec cette fonction, obtenir un rang de transition
  • Utiliser ce rang et Observer le site pendant une phase de détection

Pendant cette phase de détection, le rang du document va changer pour empirer. L’objectif est simple : observer le comportement de l’éditeur du site au vu de cette modification de rang. C’est véritablement une étude comportementale (réaction face à la frustration) pour identifier des coupables de modifications abusives. D’après le brevet, si une modification est observée pendant cette période, le document est effectivement sujet à des modifications abusives. (Revendications 6 et 19).

En cas de multiples signaux négatifs, le système peut désigner comme spam le document, la page, le site voire le domaine (un domaine peut abriter plusieurs sites). 

Combien de temps dure cette phase de transition ?

Les exemples du brevet parlent de 20 jours de baisse vers la position avant la transition et de 70 jours de transition vers la position finale. Au total l’exemple parle de 90 jours de transition, mais c’est un exemple. On ne peut assurer avec certitude que la période probatoire dure bien 90 jours, mais c’est la meilleure information disponible à l’heure actuelle. Il explique même que la transition peut être observée selon « un facteur basé sur le temps ou sur un facteur aléatoire ».

Le brevet suggère également que l’algorithme ne dépend pas que de 2 fonctions, et peut injecter des variations aléatoires pour mieux pousser l’éditeur à réagir

Définir qu’on est atteints par le Transition Rank et en sortir

Il est particulièrement difficile de détecter qu’on est atteint par le Transition Rank : après tout, l’algorithme définit qu’il y a plusieurs fonctions de transitions (il parle de « damped response transition function » et de « initially inverse response transition function » (ici illustré dans les graphiques)) mais laisse la porte ouverte pour des modifications. Il faut considérer les éléments suivants : 

  • Le transition rank ne concerne que les pages qui sont retravaillées après avoir obtenu une position.
  • La phase de transition est découpée en 2 parties : la première est un mouvement vers un rang de transition pendant une durée déterminée et la deuxième suit une modification du rang selon la fonction de transition sélectionnée.

Suivre les positions peut se faire à intervalle réguliers pour voir les évolutions des pages qui subissent des modifications : c’est essentiel lorsqu’on retravaille des contenus avec un objectif SEO.

On vient de parler de détecter le transition rank mais quel moyen d’en sortir ? 

Il n’est pas possible de sortir de soi-même du transition rank, la seule méthode est d’attendre 3 mois en monitorant les positions dans les résultats de recherche d’observer une stabilisation de celles-ci. Pourquoi 3 mois ? C’est parce que les 90 jours de l’exemple correspondent à 3 mois et qu’on peut raisonnablement envisager que Google n’a pas besoin d’autant de temps pour identifier si une modification de position est légitime ou pas. On peut par précaution attendre plus que 3 mois, mais il faut surtout attendre une stabilisation des positions.

Éviter le Transition Rank

Mais alors comment éviter le Transition Rank ?

Il semble que le brevet ne parle que de la transition pour donner suite à une modification de rang suspecte. C’est toute la partie suspicion qu’il est nécessaire d’éviter dans le cadre de la modification d’un contenu ou du profil de liens d’une page.

Or, il est naturel qu’une page soit modifiée, le web change, les URLs sont parfois mises à jour et modifiées pour mieux correspondre à un besoin des utilisateurs, les sites font des migrations pour changer un design ou adopter une nouvelle approche stratégique. Un texte va s’améliorer si l’éditeur décide que son avis a changé ou alors qu’il a trouvé des précisions pour améliorer l’apport d’informations.

On peut donc partir sur 2 approches :

  • Une approche méthodologique qui consiste à faire en sorte qu’une modification pourrait activer en interne un process de validation avant publication pour éviter d’autres modifications dans la continuité pour corrections ou ajustements : c’est une mesure préventive car une page modifiée est une page concernée.
  • Une approche par des éléments plus précis après une analyse spécifique des besoins de la SERP pour identifier une zone acceptable des optimisations. Si on se base sur les exemples fournis par le brevet, une amélioration de 10% d’un critère de ranking est suffisante pour justifier la transition, il faudrait donc garder un seuil d’acceptabilité pour ces critères en dessous de 10% de ce que propose la moyenne des contenus qui arrivent à se positionner correctement sur cette SERP.

Pour conclure, ce brevet montre surtout la volonté de Google d’éviter un spam modifiant de façon trop évidente ses résultats de recherche. On pourrait traduire cette approche par une volonté de la part de Google de ne pas faire confiance aveuglément à toutes les modifications qui ont lieu sur le web, et d’évaluer la réaction de l’éditeur de site avant de lui donner le crédit de ses modifications.

Du point de vue des référenceurs, ça va se traduire par une difficulté à obtenir des résultats rapides et fiables à court terme, ce qui peut être un point de discorde avec les décideurs qui ont besoin de voir des résultats pour valoriser un investissement parfois non négligeable sur des pratiques qu’ils ne maîtrisent pas forcément.

En résumé, le SEO peut bien prendre 3 mois dans le cadre de modifications de l’existant en vue d’optimisation des positions

Sources :

Transition Rank :

Titre : Changing a rank of a document by applying a rank transition function 
Auteur : Ross Koningstein
https://patents.google.com/patent/US8924380B1/en

Autres sources :

Verified Bots (Cloudflare) : Barkrowler (crawler Babbar)

https://radar.cloudflare.com/traffic/verified-bots